Audi A8 2004, un nouveau départ

Publié le 30 mars 2003 dans 2003 par Jacques Duval

Saluée par de nombreux connaisseurs comme la meilleure voiture au monde, l'Audi A8 n'a pourtant pas connu jusqu'ici une carrière remarquable en Amérique. Trahie par une silhouette vieillissante et un peu fade, elle a toujours évolué dans l'ombre de ses rivales directes que sont la Mercedes de Classe S et la BMW Série 7. Le modèle de 3e génération, déjà vendu en Europe et prévu ici pour 2004, doit redresser la situation. Il s'y applique en adoptant un caractère sportif plus marqué sans renier pour autant les qualités qui ont permis à l'A8 de se forger une clientèle très loyale. Et pour nous la rendre encore plus sympathique, Audi l'a fait dessiner par un Québécois (voir encadré).

Dévoilée à Barcelone, la nouvelle capitale mondiale du design, l'A8 a abandonné son style un peu lourdaud au profit d'une ligne arquée caractérisée par un minimum de porte-à-faux à l'avant et un aérodynamisme très poussé. En plus d'afficher un Cx très favorable de 0,27, le profil met parfaitement en relief les efforts investis dans l'allègement de la voiture. Naturellement, l'aluminium joue encore un rôle considérable dans la construction du véhicule, que ce soit sur le plan de la carrosserie, des trains roulants ou du châssis qui continue de faire appel à la technologie dite Space Frame. Celle-ci consiste en une structure de caisse ultrarésistante en aluminium à laquelle sont intégrés de larges panneaux d'aluminium interactifs qui supportent l'ensemble de la construction.

Réputée pour sa solidité en cas d'accident, cette technologie bénéficie dans sa dernière application sur l'A8 d'une rigidité accrue de 60 %. Elle a aussi permis de réaliser la voiture la plus légère de sa catégorie et cela en dépit du fait que cette berline présente des dimensions supérieures à celles de ses concurrentes tout en étant dotée de la traction intégrale Quattro. Profitons-en pour souligner que seule la version à empattement allongé de 13 cm sera commercialisée en Amérique et que l'empattement normal ne sera utilisé que pour la S8 qui n'arrivera, hélas, que dans deux ans.

Suspension pneumatique et 6 vitesses

L'A8 innove encore en ayant recours à une suspension pneumatique à hauteur variable dont la garde au sol oscille entre 9,5 et 14,5 selon les conditions d'utilisation et qui fonctionne en parallèle avec un amortissement à pilotage électronique qui s'adapte lui aussi aux exigences de la conduite. Le conducteur a le choix entre quatre modes différents d'amortissement et de hauteur de caisse. En mode « dynamic », par exemple, le centre de gravité de la voiture est abaissé et la suspension adopte une rigidité accrue, deux facteurs qui favorisent une conduite sportive.

En insistant beaucoup sur la sportivité de la nouvelle A8, il est clair que les gens d'Audi veulent récupérer une partie de la clientèle abandonnée par BMW avec sa récente Série 7. S'appuyant sur ses récentes victoires aux 24 Heures du Mans avec les R8, la firme d'Ingolstadt a mis au point une voiture carrément axée sur l'agrément de conduite avec un moteur V8 40 soupapes accusant un gain de 20 chevaux par rapport à l'ancien et une transmission Tiptronic ZF à 6 rapports. Cette dernière étrenne une paire de palettes solidaires du volant semblables aux systèmes utilisés dans certaines Ferrari et qui permet de passer les rapports manuellement. Ces deux leviers ont l'avantage de suivre les mouvements du volant, mais leur emplacement ne correspond pas à la position normale des mains et me sont apparus peu ergonomiques lors de l'essai. Tout comme les nouvelles Jaguar S-Type, la dernière A8 utilise un frein de stationnement à commande électromécanique contrôlé à partir d'un actionneur placé sur la console centrale.

L'électronique simplifiée

Depuis quelques années, l'automobile de luxe est entrée dans l'ère de la communication en faisant appel à des systèmes de commandes dont la complexité a atteint son apogée dans la dernière BMW 745i. En multipliant les fonctions que l'on peut contrôler à partir d'un écran et d'une commande centrale, ces systèmes sont, à première vue, impressionnants. À l'usage toutefois, ils deviennent de véritables cauchemars en abusant de la patience des conducteurs même les plus futés. Audi a voulu simplifier ce concept en dotant la nouvelle A8 d'une interface appelée MMI (Multi Media Interface) qui se distingue par sa grande logique de fonctionnement. Le terminal comporte huit touches de fonction réparties en quatre groupes : chaîne audio, téléphonie cellulaire, navigation et accessoires. En appuyant sur l'une des touches correspondantes, on peut ensuite naviguer sur un écran couleur de 18 cm à l'aide d'un bouton central rotatif. En bref, le système est plus facile à faire fonctionner qu'à décrire et marque un progrès considérable par rapport aux inextricables cafouillis en usage ailleurs. Et c'est un nul qui vous le dit.

Finalement, l'Audi A8 2004 fait aussi un premier pas vers des systèmes d'éclairage qui pourront d'ici peu s'en remettre au GPS (système de positionnement par satellite) pour offrir un éclairage adapté à l'environnement du véhicule. Pour l'instant, Audi propose un troisième faisceau lumineux pour les phares avant. Son fonctionnement est dicté par l'angle de braquage de manière à éclairer dans un virage des zones précédemment vouées à l'obscurité et ce jusqu'à un angle de 90° par rapport à l'axe de déplacement de la voiture. En marche arrière, un système particulièrement complexe active automatiquement deux projecteurs additionnels. Voilà une idée bien lumineuse !

La boucle catalane

C'est sur une boucle d'environ 200 km à travers la Catalogne que j'ai pu évaluer la version 2004 de l'Audi A8. Parti de l'aéroport de Barcelone, l'itinéraire nous a menés vers Sant Andreu de la Barca et Igualada tantôt par l'autoroute, tantôt par de petites routes aux virages révélateurs. L'impression générale est celle d'une voiture qui n'est pas trahie par son gabarit et qui donne l'impression d'être plus petite qu'elle ne l'est en réalité. Elle reste agile dans les virages pointus, bien plantée sur ses quatre roues motrices sans succomber au moindre roulis. La mollesse que l'on reproche quelquefois aux produits Audi a disparu et je dirais que la nouvelle A8 se situe à mi-chemin entre le modèle antérieur et sa version S8. Confortable, silencieuse même à 200 km/h et jamais prise au dépourvu en conduite sportive. Des collègues ont trouvé la direction trop légère, ce qui est vrai à faible vitesse, mais l'assistance variable règle le problème à plus vive allure. Le freinage reste impressionnant et, sans être spectaculaires, les performances s'avèrent stimulantes avec un 0-100 km/h bouclé en moins de 7 secondes.

Audi a aussi réussi à éliminer le fameux « temps de réponse » de la transmission automatique avec une nouvelle boîte à 6 rapports qui rétrograde instantanément lorsqu'on enfonce l'accélérateur. À l'intérieur, Audi n'a pas perdu la touche et le tableau de bord a le mérite d'être nouveau tout en conservant les attributs habituels des voitures d'Ingolstadt. Beaucoup de bois, de l'aluminium, des touches d'originalité (le bouton de la commande centrale notamment) et des cadrans qui, sans qu'on l'ait voulu, affichent un petit air rétro. L'indicateur de vitesse et le compte-tours sont logés au fond d'une sorte de cylindre qui n'est pas sans rappeler certaines américaines des années 50.

Même dans la version à empattement normal mise à l'essai, les passagers arrière disposent d'amplement d'espace et d'une petite console regroupant un briquet et les boutons de réglage pour la climatisation.

Comme sa devancière, l'A8 2004 s'adresse à une clientèle non conformiste qui recherche une voiture différente des autres et dont les qualités intrinsèques ont préséance sur le standing. Comme elle était déjà considérée comme la meilleure au monde dans sa classe, les progrès réalisés dans le nouveau modèle laissent peu de place à la critique. Habilement redessinée par Dany Garand et améliorée à presque tous les points de vue, l'Audi A8 devrait enfin connaître le succès qu'elle mérite.